Nous célébrons la fête de Noël cette année alors que notre pays est
traversé de troubles graves.
Ils sont révélateurs d’une profonde
détresse et souffrance. Beaucoup de nos concitoyens vivent dans des
situations précaires avec un sentiment d’injustice et d’abandon. Il faut
entendre cette détresse. La Bible parle du « cri des pauvres ».
Notre
mode de vie occidental a produit un monde à deux vitesses, une distance
entre ceux qui n’arrivent plus à vivre dignement et ceux qui sont de
plus en plus riches, un fossé entre les riches et les pauvres, une
société de technocrates qui concentre le pouvoir et ceux qui deviennent
invisibles. Ce phénomène n’est pas seulement français, mais il traverse
le monde occidental. C’est notre modèle de société qui est interrogé.
Nous avons engendré une culture de l’individualisme et même de
l’idolâtrie de la satisfaction des désirs immédiats où beaucoup sont
laissés sur le bord de la route. Le désir individuel l’emporte sur la
recherche du bien commun. L émotion remplace l’exigence de la raison et
de l’intelligence. Le « buzz » médiatique l’emporte sur la recherche de
la vérité. Aussi beaucoup de personnes sont laissées sur le bord de la
route, les plus vulnérables et les plus fragiles sont exclus. Le Pape
François parle de culture du déchet, les déchets n’étant pas seulement
les ordures ménagères mais des hommes et des femmes. Il parle aussi de
mondialisation de l’indifférence.
S’ajoute à cela le vide de sens, l’absence de proposition transcendante.
Cela ne peut que conduire à la colère et la tentation de la violence.
On en devient incapable d’écouter l’autre et donc de se parler, d’entrer
dans un véritable dialogue. Le dialogue suppose le choix de la
bienveillance, la recherche de la vérité et du bien commun.
En cette fête de Noël, je ne peux qu’inviter à tout mettre en œuvre
pour favoriser le dialogue entre nous. Je souhaite que tous les
chrétiens du diocèse du Mans travaillent à faciliter le dialogue et la
réflexion entre nos concitoyens. Nous devons entendre la détresse de
ceux qui souffrent, chercher ensemble la meilleure manière de servir le
bien commun, écarter la tentation de la violence car la violence
engendre la violence, mettre au cœur de nos préoccupations les plus
fragiles et les plus vulnérables, nous interroger ensemble sur l’avenir
que nous voulons construire pour vivre ensemble.
La Bible associe quatre mots : Amour et Vérité, Justice et Paix. Nous
croyons que l’amour est plus fort que la haine, la vérité condition de
la liberté plus forte que le mensonge, la paix fruit de la justice plus
forte que la violence. Travaillons à l’émergence d’un nouvel art de
vivre même si cela suppose une véritable conversion personnelle et
collective.
Bon Noël à tous.
Yves Le Saux
Evêque du Mans
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